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Droit à la déconnexion : l’Ufcv interroge ses salariés

posté le 30 août 2019

Dans : La vie de l'Ufcv


Avec l’utilisation incontournable du numérique, les modes de travail évoluent. La loi El Khomri a introduit en 2016, pour la première fois dans le droit du travail, un « droit à la déconnexion » s’appliquant à tous les salariés. 

Le département RH de l’Ufcv s’apprête à diffuser à l’ensemble des salariés de l’association un questionnaire, encourageant chacun à s’interroger sur ses pratiques et sur l’impact des nouvelles technologies sur son équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Agathe Barnay, Directrice des Ressources Humaines, explique les constats qui ont motivé cette démarche et ses objectifs. 


 

Quand on parle de « droit à la déconnexion », de quoi s’agit-il exactement ?


Le droit à la déconnexion est apparu assez récemment, avec le développement des outils informatiques portables. Avec la possibilité d’accéder à ses mails depuis chez soi, d’avoir un téléphone et un ordinateur portables professionnels, s’est posée la question de la frontière entre la vie privée et la vie professionnelle. La législation sur le droit à la déconnexion est née des dérives qui ont pu être constatées quand la vie professionnelle prend trop le pas sur la vie privée.

Quelle vision l’Ufcv porte-t-elle sur le droit à la déconnexion ?


Aujourd’hui, ce que l’on constate, c’est que les personnes qui travaillent à l’Ufcv ont toutes un fort engagement vis-à-vis de leur mission. Nous ne sommes pas une entreprise traditionnelle. L’Ufcv est une association à forte valeur sociale dans laquelle les salariés se reconnaissent ; on est à la frontière entre le militantisme et le salariat. Toute la complexité se trouve là. Évidemment, si je vais au travail  le matin en me sentant engagé dans mes missions, c’est une excellente chose ; mais j’aurais peut-être plus de mal à couper le lien au travail à la fin de la journée. 

Il y a un an et demi, le département RH a réalisé un questionnaire auprès des salariés concernant leurs relations dans le travail, leurs missions et leur charge de travail. On s’est rendu compte que les gens se sentent parfois indispensables à leur poste. C’est problématique parce qu’ils ne s’autorisent pas à déconnecter, et il y a là un risque de burnout, qui est une réalité que nous ne devons pas négliger. Et puis il ne faut pas oublier aussi qu’un bon équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle a des effets positifs sur le travail.

Il est donc nécessaire de se questionner rapidement sur l’équilibre de chacun. Même si les objectifs poursuivis sont nobles, il faut que les gens se rappellent que nul n’est irremplaçable et que tout salarié a droit au repos et au respect de sa vie personnelle. 

Cet ensemble de raisons a motivé la création du questionnaire diffusé aujourd’hui ?


Exactement. Cet ensemble de raisons, mais aussi, la constatation de certaines pratiques, telles que les envois de mails tôt le matin, tard le soir, pendant les congés, voire même pendant des arrêts maladie. Tout ça nous conduit à nous dire qu’il faut amorcer une réflexion de fond sur le sujet.

Aussi, le travail sur le droit à la déconnexion s’inscrit dans un travail plus large, mené entre autres par les ressources humaines ; qui est d’interroger les pratiques, de prévenir des risques sociaux et professionnels, d’accompagner et de protéger les salariés. 

Pourquoi avoir fait le choix de recueillir les témoignages des salariés dans un questionnaire ? 


Parce que je me rends bien compte, quand j’en discute avec les uns et les autres, que pour les nouvelles générations, il y a une plus grande sensibilisation au droit à la déconnexion. Les générations de salariés plus anciennes, elles, considèrent qu’il est normal de s’investir énormément. Le but du questionnaire, c’est déjà d’amener chacun à s’interroger sur ses pratiques. 

Bien sûr, l’analyse des réponses va nous nous permettre de tirer des enseignements : quel est le pourcentage de salariés qui se surinvestissent ? Est-ce que cette tendance est partagée par tous ? Cela va nous permettre de confirmer certaines hypothèses. Par exemple : est-ce que les gens travaillent au-delà de leurs horaires ? Mais surtout, nous souhaitons comprendre les mécanismes qui permettent à ces comportements de se développer. 

Pourquoi les gens travaillent au-delà de la durée du travail légale ? Est-ce que c’est parce qu’ils se sentent obligés de le faire, par leur employeur ou par la nature de leur mission ? Ou est-ce que c’est parce qu’ils ont envie de le faire ? C’est important de comprendre ce qui se joue, pour ensuite agir dans le but d’un rééquilibrage.

Il y a peut-être un travail à mener, au-delà d’acculturer les gens à déconnecter, dans nos pratiques managériales, mais aussi dans la manière dont on crée des doublons par exemple. C’est-à-dire des gens qui peuvent être capables d’aider, d’épauler, et de palier aux absences pour éviter que les salariés ne se sentent pas autorisés à déconnecter. 

À l’Ufcv, y-a-t-il des secteurs d’activité par exemple, où l’on sait que les salariés ont plus de mal à déconnecter ?


Non, je crois que c’est surtout une question de personne et d’outils. Si j’ai un téléphone portable et un ordinateur portable avec un accès à mes mails, je vais avoir envie de regarder mes mails en dehors des horaires de travail. Et plus on monte dans la hiérarchie, plus les gens se sentent obligés de montrer qu’ils sont infaillibles, et donc d’être disponibles tout le temps. Le problème, c’est aussi que les salariés regardent les pratiques de leur hiérarchie, c’est humain !

Et un salarié qui voit que son N+1 envoie des mails à 7h du matin ou à 21h, pendant ses congés… peut penser : « Moi aussi, il faut que je sois tout le temps réactif. » De la même manière, une personne qui aurait tendance à trop travailler pourrait se dire : « Puisque mon N+1 fait pareil, je ne vois pas pourquoi je m’interdirais d’envoyer des mails en dehors des heures de travail. » Si la hiérarchie ne montre pas à ses salariés qu’ils sont autorisés à déconnecter parce que lui ne donne pas l’exemple, et bien ils vont avoir plus de mal à le faire.

C’est pour cela que tout le monde doit s’interroger, et moi la première, sur ses pratiques et sur ce qu’elles renvoient. Et si l’on veut que ces pratiques changent, c’est aussi le haut de la pyramide qui doit faire preuve d’exemplarité.

Quelles suites vont être données à ce questionnaire ?


La première étape, une fois que les données auront été traitées et analysées, sera une très belle infographie réalisée par le Service communication, envoyée à l’ensemble des salariés ! Pour les remercier d’avoir répondu et puis leur donner, évidemment, les résultats du questionnaire. 

Dans un second temps va se dérouler la négociation avec les délégués syndicaux, pour conclure  un accord ou aboutir à une charte de bonnes pratiques concernant le droit à la déconnexion. Le document qui naîtra de ces négociations, qui commenceront  au dernier trimestre 2019, rappellera un certain nombre de principes et sera transmis à l’ensemble des salariés.